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  • Le bâteau de Thésée

    Le bâteau de Thésée

    Le navire à trente rames sur lequel Thésée s’était embarqué avec les jeunes enfants, et qui le ramena heureusement à Athènes, fut conservé par les Athéniens jusqu’au temps de Démétrius de Phalère. Ils en ôtaient les pièces de bois, à mesure qu’elles vieillissaient, et ils les remplaçaient par des pièces neuves, solidement enchâssées. Aussi les philosophes, dans leurs disputes sur la nature des choses qui s’augmentent, citent-ils ce navire comme un exemple de doute, et soutiennent-ils, les uns qu’il reste le même, les autres qu’il ne reste pas le même. »

    Plutarque, Vies des hommes illustres

    Vaisseau de Thésée sombrant pendant la bataille de Quiberon, en 1759. Détail d’un tableau de Richard Paton

    Dans Wikipédia : La légende du bateau de Thésée est évoquée par Plutarque dans Vies des hommes illustres. Thésée serait parti d’Athènes combattre le Minotaure. À son retour, vainqueur, son bateau aurait été préservé par les Athéniens : ils retiraient les planches usées et les remplaçaient — de sorte que le bateau resplendissait encore des siècles plus tard — jusqu’au point où il ne restait plus aucune planche d’origine. Deux points de vue s’opposèrent alors : les uns disaient que ce bateau était le même, les autres que l’entretien en avait fait un tout autre bateau.

  • Tubal Caïn

    Tubal Caïn

    Tsilla, de son côté, enfanta Tubal Caïn, qui forgeait tous les instruments d’airain et de fer. La soeur de Tubal Caïn était Naama.

    La bible, chapitre 4, verset 22 du livre de la Genèse.

    Dans Wikipédia: fils de Lamech et de Tsillah, descendant de Caïn, il passe pour avoir inventé l’art de travailler le fer et l’airain. Il est parfois rapproché au dieu Héphaïstos ou Vulcain3. On lui attribue l’invention de l’alchimie4.

    Dans certaines versions d’une légende médiévale, il a été tué par son père Lamech, après avoir provoqué la mort accidentelle de leur aïeul Caïn2.

    À propos de Caïn, dans Wikipédia: Caïn est un personnage du Livre de la Genèse (qui est le premier livre des cinq qui composent ce que le judaïsme appelle Torah et le christianisme Pentateuque) et du Coran. Selon ces textes, Caïn, fils aîné d’Adam et Ève, tue son frère cadet Abel. Caïn est ainsi, pour le Livre saint, le premier meurtrier de l’humanité, que Dieu condamne ensuite à l’exil (dans le Pentateuque, la loi du talion intervient dans des livres venant après la Genèse). Le mythe de Caïn a donné lieu à de nombreuses interprétations, théologiques, mais aussi artistiques, psychanalytiques, anthropologiques, etc1.

    Tubal-cain’s bronze and iron. Genesis cap 4 v 22. De Vos

  • Notre-Dame de Paris, Victor Hugo

    Notre-Dame de Paris, Victor Hugo

    Notre-Dame de Paris est en particulier un curieux échantillon de cette variété. Chaque face, chaque pierre du vénérable monument est une page non seulement de l’histoire du pays, mais encore de l’histoire de la science et de l’art. Ainsi, pour n’indiquer ici que les détails principaux, tandis que la petite Porte-Rouge atteint presque aux limites des délicatesses gothiques du quinzième siècle, les piliers de la nef, par leur volume et leur gravité, reculent jusqu’à l’abbaye carlovingienne de Saint-Germain-des-Prés. On croirait qu’il y a six siècles entre cette porte et ces piliers. Il n’est pas jusqu’aux hermétiques qui ne trouvent dans les symboles du grand portail un abrégé satisfaisant de leur science, dont l’église de Saint-Jacques-de-la-Boucherie était un hiéroglyphe si complet. Ainsi, l’abbaye romane, l’église philosophale, l’art gothique, l’art saxon, le lourd pilier rond qui rappelle Grégoire VII, le symbolisme hermétique par lequel Nicolas Flamel préludait à Luther, l’unité papale, le schisme, Saint-Germain-des-Prés, Saint-Jacques-de-la-Boucherie, tout est fondu, combiné, amalgamé dans Notre-Dame. Cette église centrale et génératrice est parmi les vieilles églises de Paris une sorte de chimère ; elle a la tête de l’une, les membres de celle-là, la croupe de l’autre ; quelque chose de toutes. »

    Victor Hugo, Notre-Dame de Paris

  • Poème Sur La 7ème, Philippe Labro et Johnny Hallyday

    Poème Sur La 7ème, Philippe Labro et Johnny Hallyday

    Qui a couru sur cette plage ?
    Elle a dû être très belle
    Est-ce que son sable était blanc ?

    Est-ce qu’il y avait des fleurs jaunes
    Dans le creux de chaque dune ?
    J’aurais bien aimé toucher du sable
    Une seule fois, entre mes doigts

    Qui a nagé dans cette rivière ?
    Vous prétendez qu’elle était fraîche
    Et descendait de la montagne ?

    Est-ce qu’il y avait des galets
    Dans le creux de chaque cascade ?
    J’aurais bien aimé plonger mon corps,
    Une seule fois, dans une rivière

    Dîtes, ne me racontez pas d’histoires,
    Montrez-moi des photos pour voir
    Si tout cela a vraiment existé

    Vous m’affirmez qu’il y avait du sable,
    Et de l’herbe, et des fleurs, et de l’eau,
    Et des pierres, et des arbres, et des oiseaux ?
    Allons ! Ne vous moquez pas de moi

    Qui a marché dans ce chemin ?
    Vous dîtes qu’il menait à une maison ?
    Et qu’il y avait des enfants qui jouaient autour ?
    Vous êtes sûrs que la photo n’est pas truquée ?
    Vous pouvez m’assurer que cela a vraiment existé ?

    Dîtes moi, allons ne me racontez plus d’histoires
    J’ai besoin de toucher et de voir pour y croire

    Vraiment ? C’est vrai ? Le sable était blanc ?
    Vraiment ? C’est vrai ? Il y avait des enfants,
    Des rivières, des chemins et des cailloux, des maisons ?
    C’est vrai ? Ça a vraiment existé ?
    Ça a vraiment existé ?
    Vraiment ?

    Auteur : Philippe Labro
    Compositeur : Eddie Vartan

  • Bucéphale, Alain

    Bucéphale, Alain

    Lorsqu’un petit enfant crie et ne veut pas être consolé, la nourrice fait souvent les plus ingénieuses suppositions concernant ce jeune caractère et ce qui lui plaît et déplaît ; appelant même l’hérédité au secours, elle reconnaît déjà le père dans le fils ; ces essais de psychologie se prolongent jusqu’à ce que la nourrice ait découvert l’épingle, cause réelle de tout.

    Lorsque Bucéphale, cheval illustre, fut présenté au jeune Alexandre, aucun écuyer ne pouvait se maintenir sur cet animal redoutable. Sur quoi un homme vulgaire aurait dit : « Voilà un cheval méchant. » Alexandre cependant cherchait l’épingle, et la trouva bientôt, remarquant que Bucéphale avait terriblement peur de sa propre ombre ; et comme la peur faisait sauter l’ombre aussi, cela n’avait point de fin. Mais il tourna le nez de Bucéphale vers le soleil, et, le maintenant dans cette direction, il put le rassurer et le fatiguer. Ainsi l’élève d’Aristote savait déjà que nous n’avons aucune puissance sur les passions tant que nous n’en connaissons pas les vraies causes.

    Bien des hommes ont réfuté la peur, et par fortes raisons ; mais celui qui a peur n’écoute point les raisons ; il écoute les battements de son cœur et les vagues du sang. Le pédant raisonne du danger à la peur ; l’homme passionné raisonne de la peur au danger ; tous les deux veulent être raisonnables, et tous les deux se trompent ; mais le pédant se trompe deux fois ; il ignore la vraie cause et il ne comprend pas l’erreur de l’autre. Un homme qui a peur invente quelque danger, afin d’expliquer cette peur réelle et amplement constatée. Or la moindre surprise fait peur, sans aucun danger, par exemple un coup de pistolet fort près, et que l’on n’attend point, ou seulement la présence de quelqu’un que l’on n’attend point. Masséna eut peur d’une statue dans un escalier mal éclairé, et s’enfuit à toutes jambes.

    L’impatience d’un homme et son humeur viennent quelquefois de ce qu’il est resté trop longtemps debout ; ne raisonnez point contre son humeur, mais offrez-lui un siège. Talleyrand, disant que les manières sont tout, a dit plus qu’il ne croyait dire. Par le souci de ne pas incommoder, il cherchait l’épingle et finissait par la trouver. Tous ces diplomates présentement ont quelque épingle mal placée dans leur maillot, d’où les complications européennes ; et chacun sait qu’un enfant qui crie fait crier les autres ; bien pis, l’on crie de crier. Les nourrices, par un mouvement qui est de métier, mettent l’enfant sur le ventre ; ce sont d’autres mouvements aussitôt et un autre régime ; voilà un art de persuader qui ne vise point trop haut. Les maux de l’an quatorze vinrent, à ce que je crois, de ce que les hommes importants furent tous surpris ; d’où ils eurent peur. Quand un homme a peur la colère n’est pas loin ; l’irritation suit l’excitation. Ce n’est pas une circonstance favorable lorsqu’un homme est brusquement rappelé de son loisir et de son repos ; il se change souvent et se change trop. Mais ne dites jamais que les hommes sont méchants ; ne dites jamais qu’ils ont tel caractère. Cherchez l’épingle.

    Émile Chartier dit Alain, 8 décembre 1922, Propos sur le bonheur

  • Le dépouillement des métaux, René Guénon

    Le dépouillement des métaux, René Guénon

    Guénon précise à ce sujet sur la disposition intérieure du postulant : Il est évident que, de deux ignorants, celui qui se rend compte qu’il ne sait rien est dans une disposition beaucoup plus favorable à l’acquisition de la connaissance que celui qui croit savoir quelque chose : … même en admettant une égale bonne volonté chez les deux individus considérés il n’en reste pas moins, dans tous les cas, que l’un d’eux aurait tout d’abord à se débarrasser des idées fausses dont son mental est encombré tandis que l’autre serait tout au moins dispensé de ce travail préliminaire et négatif, qui représente un des sens de ce que l’initiation maçonnique désigne symboliquement comme le dépouillement des métaux.

    La symbolique maçonnique du troisième millénaire, Irène Mainguy

  • Exercice de méditation, Christophe André

    Exercice de méditation, Christophe André

    Lors d’une retraite de pleine conscience, je me souviens que notre instructeur nous avait proposé l’un de ces exercices bizarres dont les maîtres de méditation ont le secret. Il nous avait tous réunis en rond. Puis demandé de faire un pas en avant. Après quelques secondes de silence, il nous avait alors dit : « Et maintenant, essayez de ne pas avoir fait ce pas. » Je n’avais jamais entendu, ni surtout vécu quelque chose d’aussi frappant sur l’inanité de certains regrets. Et surtout, je n’avais jamais compris aussi clairement la différence entre l’enseignement par la parole et celui par l’expérience. Dans ma surprise et ma perplexité, dans l’hésitation et le trouble de mon esprit, dans mon corps qui ne savait plus que faire, tout était transmis sur l’impossibilité d’effacer et l’inutilité de regretter.

    Je médite jour après jour, Christophe André

  • L’albatros, Charles Baudelaire

    L’albatros, Charles Baudelaire

    Souvent, pour s’amuser, les hommes d’équipage
    Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers,
    Qui suivent, indolents compagnons de voyage,
    Le navire glissant sur les gouffres amers.

    À peine les ont-ils déposés sur les planches,
    Que ces rois de l’azur, maladroits et honteux,
    Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches
    Comme des avirons traîner à côté d’eux.

    Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule !
    Lui, naguère si beau, qu’il est comique et laid !
    L’un agace son bec avec un brûle-gueule,
    L’autre mime, en boitant, l’infirme qui volait !

    Le Poète est semblable au prince des nuées
    Qui hante la tempête et se rit de l’archer ;
    Exilé sur le sol au milieu des huées,
    Ses ailes de géant l’empêchent de marcher.

    Charles Baudelaire, 1821-1867

  • Demain, dès l’aube, Victor Hugo

    Demain, dès l’aube, Victor Hugo

    Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne,
    Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m’attends.
    J’irai par la forêt, j’irai par la montagne.
    Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.

    Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,
    Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,
    Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,
    Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.

    Je ne regarderai ni l’or du soir qui tombe,
    Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur,
    Et quand j’arriverai, je mettrai sur ta tombe
    Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur.

  • Propos d’un Normand, Alain

    Propos d’un Normand, Alain

    Penser n’est pas croire. Peu de gens comprennent cela. Presque tous, et ceux-là même qui semblent débarrassés de toute religion, cherchent dans les sciences quelque chose qu’ils puissent croire. Ils s’accrochent aux idées avec une espèce de fureur ; et si quelqu’un veut les leur enlever, ils sont prêts à mordre. […] Lorsque l’on croit, l’estomac s’en mêle et tout le corps est raidi. Le croyant est comme le lierre sur l’arbre. Penser, c’est tout fait autre chose. On pourrait dire : penser, c’est inventer sans croire.

    Imaginez un noble physicien, qui a observé longtemps les corps gazeux, les a chauffés, refroidis, comprimés, raréfiés. Il en vient à concevoir que les gaz sont faits de milliers de projectiles très petits qui sont lancés vivement dans toutes les directions et viennent bombarder les parois du récipient. Là-dessus le voilà qui définit, qui calcule ; le voilà qui démonte et remonte son gaz parfait, comme un horloger ferait pour une montre. Eh bien, je ne crois pas du tout que cet homme ressemble au chasseur qui guette une proie. Je le vois souriant, et jouant avec sa théorie ; je le vois travaillant sans fièvre et recevant les objections comme des amies ; tout prêt à changer ses définitions si l’expérience ne les vérifie pas, et cela très simplement, sans gestes de mélodrame. Si vous lui demandez. Croyez-vous que les gaz soient ainsi ? il répondra : Je ne crois pas qu’ils soient ainsi ; je pense qu’ils sont ainsi.

    Émile Chartier dit Alain